Le secret professionnel face à la justice québécoise s’érode-t-il?

  • 24 mars 2014
  • Josée Descôteaux - ABC-Québec

Il est presque sacro-saint, depuis belle lurette, dans la profession juridique comme chez les professionnels de la santé : le secret professionnel jouit d’une protection quasi-constitutionnelle incontestable. Indéniable mais… malléable avec la notion de « privilège relatif au litige »? C’est du moins ce que pourrait laisser croire la tendance que constate Me Sylvain Lussier, avocat chez Osler, Hoskin & Harcourt, invité par notre section de droit de la recherche et du savoir à prononcer une conférence à ce sujet, le 2 avril 2014.

Il rappellera d’abord l’évolution de l’attitude de la Cour suprême face au secret professionnel – de la règle de preuve à la règle de fond. Puis, en s’appuyant sur une série de causes plus récentes, il établira que les échanges avec les  experts se voient peu à peu dépouillés de la protection qui leur était accordée par l’Article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne et de son pendant à l’art. 29 du Code de procédure civile.

Me Lussier remontera dans le temps jusqu’en 1982, à l’affaire Descôteaux et autre c. Mierzwinski, le premier d’une série de jugements qui ont marqué l’évolution de la protection du secret professionnel. Dans cette cause, un requérant de l’aide juridique était accusé de fausse déclaration de revenu. À la suite d’une perquisition au bureau de l’aide juridique, la requête des appelants pour l’annulation de la saisie avait été rejetée.

La notion de «privilège relatif au litige» semble avoir érodé le statut de secret professionnel dans des décisions plus récentes de la Cour d’appel. Au point où la plupart des communications avec les experts relèveraient maintenant de cette catégorie de privilège…

Il se demande si la Cour d’appel a correctement appliqué au droit québécois les principes de l’arrêt Blank rendu en matière fédérale. Dans Ministre de la Justice c. Blank (2006), la Cour suprême a favorisé un point de vue plus restreint du privilège en considérant qu'il s'éteint à l'issue du litige qui lui a donné naissance.

Y a-t-il un recul du secret professionnel? Il est pertinent de se poser la question et tous les avocats qui pratiquent notamment en litige pourront trouver des réponses dans la présentation de Me Lussier.