Nouvelles technologies et santé : les nouveaux enjeux juridiques décortiqués

  • 06 novembre 2013
  • Josée Descôteaux - ABC-Québec

Caméra, enregistrement, confidentialité, patient : prononcés dans la même phrase, ces mots peuvent provoquer diverses réactions, allant de la crainte à l’aversion, en passant par le sentiment de naviguer sous un ciel opaque lorsqu’on tente de jauger leur portée.

Pourtant, les technologies de l’information et la communication virtuelle se fraient un chemin vers un nombre grandissant de sphères du secteur des soins de santé. Incidemment, elles rendent nécessaire l’établissement de nouvelles balises juridiques. Même si les lois existantes encadrent la plupart de ces nouvelles réalités, il subsiste des aires floues. C’est pour éclaircir quelques-unes d’entre elles que la section de droit de la Santé de l’ABC-Québec a organisé un mini-colloque sur les tendances, les développements et les nouveaux enjeux juridiques de l’intégration des nouvelles technologies dans le secteur de la santé.

Le dossier clinique informatisé (DCI) a déjà soulevé son lot d’interrogations et suscité l’expression de craintes liées à la confidentialité des informations. Me Éric-Alain Laville, avocat au CHUM, expliquera le cadre légal qui s’applique au DCI, mais il exposera également certains des défis auxquels les établissements peuvent être confrontés dans le cadre de son implantation. Il saura étayer son exposé d’exemples concrets puisque le DCI fait maintenant partie de la réalité au sein du CHUM.

L’informatisation des renseignements de santé représente une série de défis pour chacun des établissements de santé concernés, mais elle s’avère tout aussi complexe à l’échelon provincial.  Me Anne de Ravinel, avocate au CHU Ste-Justine, en fera l’objet de sa présentation. Elle exposera à ce titre le cadre juridique applicable au DSQ et traitera de différentes dispositions de la Loi concernant le partage de certains renseignements de santé. Elle abordera également la gestion de l’accès aux renseignements contenus au DSQ, de même que l’arrimage entre certaines lois, telles que la Loi concernant le partage de certains renseignements de santé et la Loi sur les services de santé et services sociaux.

Au fil de ces discussions, Me Mélanie Champagne, avocate spécialisée en droit de la santé chez Borden, Ladner, Gervais, expliquera la gestion du risque en illustrant ses propos avec des exemples de litiges survenus ou en cours au Canada.

Les nouvelles technologies de l’information s’avèrent des canaux de communication parfois providentiels. En contrepartie, elles peuvent donner lieu à des abus. Comment en encadrer l’usage? C’est à cette question que Me Marie-Nancy Paquet, de Morency Avocats, apportera des éléments de réponse.

Car dans ‘l’épreuve du réel’, l’application des grands principes de la jurisprudence peut rimer avec complexité. Le film d’un accouchement provenant de la caméra du nouveau papa, destiné à la postérité familiale, pourrait-il être utilisé en preuve lors d’une éventuelle poursuite pour complications médicales par exemple? Si les enregistrements des entretiens des intervenants avec leurs clients des Centres jeunesse sont légaux, devrait-on permettre aux patients de filmer leur consultation avec le médecin?

Les ‘nouvelles technos’, c’est aussi les réseaux sociaux. Plusieurs compagnies pharmaceutiques se sont d’ailleurs approprié rapidement ce nouvel outil pour promouvoir leurs produits. Les règles en matière de promotion et de publicité pour les pharmas sont très rigides, mais les réseaux sociaux se trouvent-ils dans ce cadre traditionnel, demande Me Karine Joizil, de Fasken, Martineau, DuMoulin, qui partagera l’objet de ses réflexions et recherches sur le sujet.

Les outils législatifs pourraient-ils encadrer la publicité diffusée dans un compte Facebook d’entreprise par exemple?

Les compagnies devraient-elles assumer la responsabilité des utilisateurs de médicaments ou autres produits vendus en pharmacie qui en font en masse l’éloge dans les réseaux sociaux?

Les questions sont nombreuses et complexes et la législation actuelle ne permet pas de fournir toutes les réponses : il y a la matière à discussion, riche, pour vous, juristes.

En fait, tous les avocats et toutes les avocates qui oeuvrent dans le secteur de la santé puiseront dans les propos de tous ces experts l’essence d’une pratique bonifiée par de nouvelles connaissances.